Les enjeux politiques autour des frontières maritimes

Par Alexandra Bellayer Roille
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Alexandra Bellayer Roille, "Les enjeux politiques autour des frontières maritimes", CERISCOPE Frontières, 2011, [en ligne], consulté le 26/04/2024, URL : http://ceriscope.sciences-po.fr/content/part2/les-enjeux-politiques-autour-des-frontieres-maritimes

Mers et océans ont fort longtemps été appréhendés comme des espaces dédiés à la communication et aux échanges. Les espaces marins n’étaient conçus comme ressources alimentaires potentielles qu’à proximité du littoral. Au-delà des zones côtières, le droit romain envisageait la mer comme une res communis, ouverte à la liberté de navigation et d'utilisation libre pour chacun. Les intérêts des États côtiers ou du pavillon, vont cependant s'opposer régulièrement et provoquer des revendications étatiques croissantes. Au XVIIe siècle, les juristes Grotius et Selden incarneront ainsi, à travers leur Mare liberum et Mare clausum, l’affrontement du concept de liberté absolue des mers et des théories territorialistes d’appropriation des espaces maritimes.

Une première conférence des Nations unies sur le Droit de la mer tente
en 1958 d’encadrer les prétentions d’extension de souveraineté des États sur les différentes zones maritimes. Elle se décline en quatre conventions portant sur la mer territoriale, le plateau continental, les activités de pêche et la conservation des ressources biologiques en haute mer. Une deuxième conférence affine la délimitation de la mer territoriale en 1960. En 1973 se déroule la troisième conférence qui débouche sur la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 (convention dite de Montego Bay - CMB) consacrant la dimension économique de la mer en écho aux préoccupations des États en développement. La CMB est entrée en vigueur le 16 novembre 1994 et permet de distinguer différentes zones maritimes qui peuvent être scindées en deux grandes catégories : les zones sous souveraineté de l’État côtier et les zones internationales. La CMB a tenté concrètement d’instaurer un équilibre entre des revendications étatiques contradictoires en procédant à un découpage de l’espace maritime et en imaginant une régulation nuancée des compétences selon la zone maritime considérée. C’est ainsi que plus on est proche des côtes d’un État, plus la souveraineté de celui-ci est importante, plus on s’en éloigne, plus la liberté est grande.

Chaque État est ainsi pleinement souverain sur ses eaux intérieures assimilées à des prolongements du territoire terrestre. La mer territoriale recouvre, quant à elle, la zone de mer bordant la côte. Seul l’État riverain est en mesure de délimiter sa mer territoriale à partir d’une ligne de base appelée la laisse de basse mer. Sur cette largeur maximale de 12 miles marins, l’État côtier exerce sa pleine souveraineté mais doit se plier aux exigences de la navigation et consentir un droit de libre passage inoffensif aux navires étrangers. Au-delà, l’État n’exerce que des compétences limitées sur la zone contiguë d’une largeur maximale de 24 miles marins. Dans cette zone, l’État exerce essentiellement des compétences de contrôle de nature douanière, sanitaire et environnementale qui lui permettent de prévenir et de réprimer les infractions. La zone contiguë a cependant perdu de son intérêt en raison de la consécration de la zone économique exclusive (ZEE). Dans cette dernière, d’une largeur maximale de 200 milles marins, l’État riverain possède en effet des droits exclusifs, de nature fonctionnelle, en matière d’exploration, d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles, biologiques ou non. Il exerce également sa juridiction en matière d’établissement et d’utilisation des îles artificielles, d’installations et d’ouvrages, de recherche scientifique marine ainsi que de protection et préservation du milieu marin. Il ne s’agit toutefois que de droits souverains et d’un exercice de juridiction et non d’une souveraineté pleine et entière. Les autres États y bénéficient, par conséquent, des libertés de navigation, de survol ou de poser des pipelines et des câbles sous-marins. Le régime de la ZEE est donc intrinsèquement lié à celui de la haute mer et non à celui de la mer territoriale. Si chaque État est libre de déterminer ou non une telle zone, la possession d’une ZEE est un facteur de puissance. La France, par exemple, est ainsi particulièrement attachée à la ZEE offerte par l’île de Clipperton, laquelle lui offre un espace maritime équivalent à 80% de la totalité de son territoire terrestre ainsi qu’une zone particulièrement riche en ressources thonidées et en nodules polymétalliques.Les espaces maritimes français se placent d'ailleurs au deuxième rang mondial par leur superficie de 11 035 000 km2  (États-Unis : 11 351 000 km2). Au total, le pays a des frontières maritimes avec trente pays. Sur le modèle de la ZEE, est également apparue plus récemment la zone de protection écologique (ZPE), permettant de poursuivre les infractions de pollution volontaire jusqu’à 200 milles marins. Les États côtiers peuvent, par ailleurs, définir des Zones de protection de la pêche (ZPP), d’étendues variables, dans lesquelles ils se réservent un droit de pêche exclusif.

Au-delà de ces divers espaces maritimes, les fonds marins ont également fait l’objet d’appropriation. L’idée d’un prolongement naturel du territoire terrestre sous la mer a donné naissance au concept de plateau continental. Celui-ci recouvre les fonds marins et leur sous-sol, sur une distance maximale de 350 milles marins. L’État riverain y exerce des droits exclusifs d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles, souvent très riches en nodules polymétalliques, minéraux ou espèces biologiques sédentaires. Les droits de réglementation et de contrôle permettent à l’État riverain de ne pas épuiser la ressource et n’affectent pas le régime juridique des eaux surjacentes. La haute mer enfin, appelée également eaux internationales, se caractérise par la liberté de la navigation et ne peut faire l’objet d’une quelconque appropriation. Seule est ainsi susceptible de jouer la souveraineté de l’État dont le navire bat le pavillon. L’article 89 de la CMB précise qu’ « aucun État ne peut légitimement prétendre soumettre une partie quelconque de la haute mer à sa souveraineté ». Le principe de liberté gouvernant la haute mer s’applique également à l’activité de pêche, sous réserve toutefois de l’existence de réglementations protectrices de certaines espèces menacées. Certains comportements illicites peuvent par ailleurs conduire à une réduction de cette liberté. La haute mer bénéficie donc d’un régime de liberté surveillée. Les fonds marins situés au-delà du plateau continental, constituent, quant à eux, « la Zone », laquelle a été proclamée patrimoine commun de l’humanité et soumise à un régime spécifique de régulation. La CMB a souhaité à travers ce zonage complexe, instaurer un usage pacifique et partagé des océans. En dépit de cet objectif louable, force est néanmoins  de constater que les espaces et les frontières maritimes sont régulièrement l'objet de différends.

La délimitation maritime, opération consistant à tracer une ligne de partage de souverainetés, résulte en effet de considérations géographiques mais aussi de l’évolution des rapports de force et de l’histoire des relations internationales. Elle relève alors, en pratique, de trois techniques différentes. Elle peut être unilatérale et destinée à séparer un territoire national d’un espace international. Elle peut également être conventionnelle et résulter d’un traité signé par deux États portant sur la séparation de leurs territoires maritimes. Enfin, en cas d’échec des négociations, le tracé des frontières peut être juridictionnel ou arbitral. L’opération de délimitation d’un territoire consiste à tracer une frontière entre deux États et à séparer officiellement leurs compétences. Il s’agit concrètement de marquer une ligne d’arrêt ou de front permettant de définir un territoire donné. Dans l’affaire du plateau continental de la mer Égée du 19 décembre 1978, la Cour internationale de justice a ainsi affirmé qu’« établir les limites entre États voisins, c’est tracer la ligne exacte de rencontre des espaces où s’exercent respectivement les pouvoirs et droits souverains » des États concernés. Dans cette hypothèse, l’utilisation de la ligne médiane s’impose pour la délimitation de la mer territoriale, sauf en cas d’existence de titres historiques ou de circonstances spéciales. Cette règle côtoie cependant dans la jurisprudence, celle des « principes équitables/circonstances pertinentes » pour la détermination du plateau continental et de la ZEE. (voir Georges Labrecque, Les frontières maritimes internationales – Géopolitique de la délimitation en mer, Paris, L’Harmattan, 2004 ou Julien Cazala, « Retour sur les méthodes de délimitation juridictionnelle d’espaces maritimes mises en œuvre dans quelques affaires récentes », Annuaire français de droit international, n°54, 2008, pp.411-427).

Si la jurisprudence est fournie en la matière, les différends frontaliers de nature maritime demeurent toutefois nombreux. Les enjeux économiques et politiques liés à l’appropriation de certaines ressources suscitent en effet les revendications de certains États riverains sur des espaces riches en ressources naturelles (poissons, minerais, hydrocarbures, métaux, gaz…) ou comportant une dimension économique valorisable (nouvelle route maritime). Les velléités territoriales peuvent également relever d’une volonté d’expansionnisme régional. Les enjeux politiques liés aux frontières maritimes ne consistent cependant pas seulement dans la détermination de lignes frontalières mais également dans la surveillance et la protection de ces lignes. A contrario, l’existence de zones maritimes de non-droit, a priori sous souveraineté nationale, soulève la question politico-juridique de l’intervention étatique extérieure dans des espaces nationaux défaillants.

Les enjeux liés aux revendications territoriales

En dépit de l’équilibre interétatique instauré par la CMB, la raréfaction des ressources naturelles, les conséquences du réchauffement climatique et les luttes d’influence dans des régions historiquement conflictuelles incitent de plus en plus d’États côtiers à revendiquer une extension de leurs droits exclusifs, notamment d’exploitation, et à tenter de redéfinir certaines frontières maritimes.

Les enjeux politico-économiques 

L’exemple de l’Arctique illustre parfaitement cette cristallisation des enjeux politico-économiques pour les cinq États riverains - le Canada (Inuits du Nunavut), la Russie, les États-Unis (Alaska), le Danemark (Groenland) et la Norvège (Archipel du Spitzberg) - potentiellement impliqués dans l’appropriation du pôle Nord. Le sous-sol de l’Arctique présente effectivement un important potentiel énergétique et minier (présence de gisements de pétrole, gaz, plomb, zinc, tungstène, uranium, argent, or et diamant...) et, par conséquent, des perspectives d’exploration, puis d’exploitation, extrêmement stimulantes.Selon les estimations de l’Agence américaine de recherche géologique, l’Arctique recèlerait ainsi 22% des ressources énergétiques non encore découvertes mais techniquement exploitables de la planète (Sylviane Tabarly, « Océan Arctique : des frontières maritimes à l’épreuve d’une nouvelle donne climatique », Géoconfluences : La frontière, discontinuités et dynamiques, 15 septembre 2009).

Le changement climatique provoque, par ailleurs, la fonte des glaces de l’Arctique (- 15% en 20 ans), qui permet, de manière saisonnière, le passage de la navigation commerciale. Les enjeux pour l’activité de transport maritime international et l’exploitation commerciale de ces nouvelles routes maritimes semblent considérables bien que l’effectivité pratique doive encore être démontrée et quantifiée.Le passage par les routes arctiques fait gagner beaucoup de temps comparé aux passages par les canaux de Panama ou de Suez, mais présente toutefois une série d’inconvénients non négligeables et restant à évaluer : réduction imposée de la vitesse en raison des glaces, risques de retard liés aux aléas climatiques, contraintes et coûts de construction de navires résistants (coques renforcées etc.), primes d’assurance plus élevées, équipages expérimentés, absence de ports, etc.
Le passage Nord-Est ramènerait, en théorie, la distance entre Rotterdam et Yokohama de 11 200 à 6 500 mn, soit un voyage 42%  moins long que le trajet actuel par le canal de Suez. Le passage du Nord-Ouest réduirait, quant à lui, le chemin de Rotterdam à Seattle de 2 000 mn, soit 25% de moins que par le canal de Panama.

Si le pôle Nord n’était, jusqu’à présent, soumis à aucune souveraineté territoriale, les potentialités fort attractives de la fonte de la banquise ont donc conduit les États riverains à formuler officiellement des revendications de plus en plus précises. Le Danemark estime ainsi que la dorsale de Lomonossov est une extension du Groenland. La Norvège a, pour sa part, saisi la Commission des Nations unies sur les limites du plateau continental (CLPC) d'une demande d'extension de sa zone des 200 miles marins dans trois secteurs de l’Atlantique du Nord-Est et en Arctique. La Russie a également déposé une demande auprès de la Commission pour l’extension de son plateau continental jusqu’au pôle Nord lui-même (extension sur 18% de l’Arctique - théorie des segments). La revendication russe repose sur l’idée que les dorsales de Lomonossov et de Mendeleïev constituent des prolongements naturels du territoire national. Le 2 août 2007, Arktika 2007, une expédition exploratrice russe très médiatisée, a d’ailleurs planté symboliquement un drapeau russe sous le pôle Nord, provoquant de vives tensions diplomatiques avec les autorités canadiennes.

 

 

Ce même mois, une expédition américaine s’est rendue dans la zone arctique afin de cartographier les fonds marins et de définir les limites du plateau continental de l’Alaska. Les États-Unis estiment que les eaux arctiques constituent un détroit international. Le Premier ministre canadien a, de son côté, annoncé, la mise en place d’une Stratégie intégrée pour le Nord consistant en la création d’une patrouille de navires extracôtiers, d’un centre d’entraînement militaire à Resolute Bay, porte d’entrée de la route Nord-Ouest, d’une mission de cartographie géologique et d’un port en eau profonde à Nanisivik. La stratégie canadienne tend ainsi à prendre possession de la zone (use it or lose it). Pendant l’été 2008, des chercheurs danois et canadiens ont démontré que la dorsale serait bien l’extension du Groenland et du continent nord-américain, en raison de caractéristiques géologiques identiques. Les gardes-côtes américains et canadiens ont pour leur part mené en août et septembre 2008 une mission conjointe de collecte de données afin de délimiter l’extension de leur plateau continental.

Tous ces États côtiers - à l’exception des États-Unis n’ayant toujours pas ratifié la CMB - entendent se voir reconnaître des droits économiques exclusifs sur les ressources de leurs fonds marins, en espérant étendre les limites de leur plateau continental jusqu’à 350 mn. Il reviendra in fine à la CLPC de trancher. Celle-ci exige pour ce faire une carte complète et précise des fonds océaniques revendiqués et que les demandes déposées devant elle ne soient pas conflictuelles. Cette condition implique que les demandeurs s’engagent à une négociation amiable ou arbitrale ultérieure en cas de différends. Chacun des États concernés a donc affûté ses prétentions et introduit les demandes respectives (Claire Védrine, « Ressources en Arctique et revendications étatiques de souveraineté », Revue générale de droit international public, n°1, 2009, pp.147-158). Le 20 novembre 2008, la Commission européenne a, pour sa part, plaidé pour la mise en œuvre d'un système de gouvernance multilatérale susceptible de garantir un triple objectif : la stabilité et la sécurité, la gestion stricte de l'environnement et l'exploitation durable des ressources libérées par le réchauffement climatique.


Les richesses révélées par la fonte des glaces attisent donc les convoitises. Elles imposent de déterminer la nature juridique de ces nouveaux espaces marins et d’en dessiner les limites afin d’éviter d’accroître les tensions et frictions politiques. D’autres litiges territoriaux bilatéraux devront cependant être également résolus, notamment ceux opposant la Norvège à la Russie dans les îles du Spitzberg, les États-Unis au Canada en mer de Beaufort ou le Canada au Danemark au sujet de l’île de Hans. La déclaration de Ilulissat, signée par les cinq États riverains le 28 mai 2008 exclut quant à elle de facto les trois autres pays circumpolaires ainsi que l’Union européenne de la prise de décision dans la région. L'importance des enjeux en Arctique pourrait également conduire les États-Unis à ratifier la CMB, afin de revendiquer un plateau continental étendu. L’administration Obama, les associations environnementalistes et les compagnies pétrolières y seraient favorables (Cyril Maré, « L’Arctique : eldorado polaire menacé cherche désespérément régime de protection juridique », Annuaire français de relations internationales, 2009, pp. 740-741). En Arctique, le réchauffement climatique induit par conséquent de nouvelles délimitations maritimes, redonne à la notion de frontière toute son importance géopolitique et pourrait même faire évoluer la position politique des  États-Unis à l’égard du droit international de la mer.

Les espaces maritimes sont, par ailleurs, dans certaines zones, l’objet d’enjeux géostratégiques et le vecteur de tentatives de rénovation des influences régionales.

Les enjeux géo-politiques

L’Asie maritime reflète parfaitement ce type de tensions et de rivalités, comme le démontre l’incident diplomatique survenu en septembre 2010 entre la Chine et le Japon, à la suite de l’arraisonnement d’un chalutier chinois dans une zone de la mer de Chine orientale, revendiquée par les deux puissances asiatiques. Fait rarissime, l’ambassadeur japonais a été convoqué pas moins de cinq fois en une semaine par le ministre chinois des Affaires étrangères afin d’obtenir la libération du capitaine du bateau. Le théâtre maritime de cet incident est un groupe d’îlots appelés Senkaku en japonais et Diaoyu en chinois situé à mi-distance d'Okinawa et de Taiwan. La Chine, Taiwan et le Japon se disputent la souveraineté territoriale sur cet archipel (Chunxiao en chinois et Shirakaba en japonais), qui présente d’abondantes ressources halieutiques et des réserves d’hydrocarbures. Au-delà de ces richesses naturelles, c’est toute la lutte d’influence régionale qui sous-tend ces démonstrations et gesticulations diplomatiques croisées. Le conflit n’étant pas anodin, les États-Unis sont également intervenus afin de rappeler à la Chine le soutien historique qu’ils apportent à leurs alliés japonais et qui constitue la « pierre angulaire de sécurité et de stabilité en Asie », aggravant l’irritation chinoise. Quelques semaines auparavant, la secrétaire d’État américaine s’était en effet déjà inquiétée des menaces pesant sur la liberté de navigation et de commerce dans la région, considérant qu’il s’agissait là d’un sujet d’intérêt national pour les États-Unis. La Chine avait alors relevé la mer de Chine méridionale au « rang d’intérêt vital » pour le pays au même titre que Taiwan, le Tibet et le Xinjiang (Arnaud de la Grange, « Pékin veut étendre sa souveraineté maritime au Sud », Le Figaro, 23 juillet 2010).

En mai 2010, la Chine a par ailleurs décrété unilatéralement l'interdiction annuelle de pêche en mer de Chine méridionale, déclaration vécue par les pays voisins comme une nouvelle tentative d’affirmation territoriale sur la zone contestée et, de facto, d’extension de la juridiction maritime de Pékin. Signe révélateur, les navires chinois de surveillance des pêches sont lourdement armés et disposés à imposer par la force l’interdiction d’exploitation. Des pêcheurs vietnamiens se sont ainsi retrouvés au coeur de vifs accrochages.

À l’instar des conflits maritimes existants entre la Chine et le Japon en mer de Chine Orientale, le Japon et la Corée du Sud (Takeshima/Tokdo) ou encore le Japon et la Russie (îles Kouriles), la Chine, Taiwan et le Vietnam se disputent la souveraineté territoriale et l’instauration d'une ZEE sur les archipels coralliens inhabités des Spratleys et des Paracels. Les Philippines, la Malaisie et Brunei ont également des prétentions partielles sur ces espaces. Cette zone est d’autant plus stratégique pour la Chine qu’une nouvelle base de sous-marins nucléaires est en construction sur l’île de Hainan, dans le sud du pays. Fidèle à sa stratégie d’occupation de la zone, Pékin a annoncé début 2010 sa ferme intention de développer le tourisme dans l’archipel des Paracels, suscitant alors de vives réactions de la part des pays voisins.


Ces incursions civiles ou militaires, tendant à l’établissement de facto d’une juridiction effective sur les zones maritimes contestées, sont désormais courantes et préparent, lentement mais sûrement, le terrain pour une future réclamation juridictionnelle ou arbitrale. Plusieurs formules symboliques sont expérimentées - installation de postes d’observation des oiseaux, missions océanographiques ou exercices navals - qui tout en demeurant dans le cadre de la déclaration de bonne conduite établie entre la Chine et l’ASEAN en 2002. Les actes de provocation se font cependant de plus en plus fréquents et constituent autant de risques d’un conflit régionalisé avec, en toile de fond, la volonté des États-Unis de garantir les approvisionnements énergétiques du Japon, de la Corée du Sud et de Taiwan. D’un point de vue juridique, il convient également de rappeler que la différence établie par la CMB entre les îles et les rochers ne se prêtant pas à l’habitation ou à une vie économique propre (article 121.3) semble quelque peu écartée par les différents États riverains qui n’hésitent pas à s’appuyer sur de simples récifs pour mesurer une nouvelle ZEE.

La mer de Chine illustre donc le caractère conflictuel que peut présenter une zone maritime, notamment lorsqu’elle est constellée d’archipels et de rochers. Elle révèle la défiance,
très souvent issue de conflits antérieurs, qui existe entre certains pays riverains. Les espaces maritimes et leurs frontières sont ainsi propices au développement de tensions bilatérales, voire régionales, élevées, car ils présentent, malgré tout, moins de risques de dégâts collatéraux que les incidents terrestres (Bernard Dujardin, « Le Contentieux de délimitation des droits territoriaux en mer », La Revue maritime, n°484, 2009, pp. 40- 47).

Les enjeux liés à la sûreté des espaces maritimes

Au-delà de la revendication territoriale, les enjeux politiques liés à la délimitation des espaces maritimes portent sur le dépassement de la frontière elle-même afin de lutter contre la criminalité maritime et sur la surveillance et la régulation du franchissement des frontières des espaces maritimes à protéger.

Le dépassement des frontières maritimes

La nécessité politique de garantir la sûreté maritime et l’ordre public, en mer et à terre, implique de lutter contre l’émergence croissante des menaces et agressions en mer ou venant de la mer, qu’il s’agisse de trafics illicites de drogues, d’armes, de migrants, de piraterie, de terrorisme maritime ou encore de pêche illicite. La lutte contre la criminalité maritime revêt ainsi une dimension politique et juridique non négligeable consistant à relever les difficultés liées aux modalités d’intervention des forces de l’ordre. L’intervention des navires de guerre susceptibles d’arraisonner navires et trafiquants est actuellement strictement encadrée par les dispositions générales de la CMB. Le concept d’exclusivité de la loi de l’État du pavillon (art. 92) combiné à celui d’exclusivité territoriale de l’État côtier sur sa mer territoriale (art. 2) constituent, en pratique, deux freins juridiques d’importance aux interventions opérationnelles des forces de l’ordre en mer.

En dépit des avancées réalisées par la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes du 19 décembre 1988 (convention de Vienne - art. 17) ou par l’accord régional de Strasbourg du 31 janvier 1995, force est de reconnaître que les difficultés liées à l'application des principes fondamentaux du droit international de la mer constituent la principale source d’inefficience
en matière de trafic de drogue par voie maritime. Des solutions fonctionnelles et pragmatiques mises en place par certains États volontaristes ont été retenues en mer Caraïbe, foyer du trafic maritime de cocaïne. Les accords bilatéraux instaurés par les États-Unis avec la grande majorité des États caribéens depuis 1999 ont ainsi révélé l’audace politique et juridique américaine en la matière. Ces accords offrent en effet aux autorités de Washington de larges prérogatives et leur ont permis d’obtenir d’États fragilisés ou de micro-États la sous-traitance de leur compétence répressive (A. Bellayer-Roille, « La lutte contre le narcotrafic en mer Caraïbe : une coopération internationale à géométrie variable », Revue générale de droit international public, n°2, juillet 2007, pp 353-388).

Ces accords comprennent plusieurs mesures et tendent à contourner les principaux obstacles liés à la souveraineté territoriale des États côtiers. Les Shiprider Agreements permettent ainsi à un agent de l’État du pavillon d'un navire suspect d’embarquer à bord d’un bâtiment américain qui va poursuivre le suspect et, sous couvert de l’agent présent à bord, le contrôler dans les eaux territoriales de l’État du pavillon. Les Hot Pursuit Agreements autorisent quant à eux la poursuite d’un navire suspect dans les eaux territoriales de l’État signataire de l’accord sans présence à bord d’un agent de cet État riverain. Ces accords dépassent ainsi amplement la lettre de l’article 111 CMB qui interdit la poursuite dès le franchissement des eaux territoriales d’un autre État. Les accords Entry to Investigate permettent même de patrouiller dans les eaux territoriales des États caribéens signataires. D’une efficacité redoutable, ces accords écornent cependant les notions fondamentales du droit international public, et notamment celle de frontière. Des solutions intermédiaires ont alors été imaginées par les États européens présents en Caraïbe à travers l’accord d’Aruba du 10 avril 2003 pour  compenser les lacunes du droit international de la mer. Tous ces instruments juridiques démontrent en toute hypothèse la nécessité pour la Communauté maritime internationale de dépasser, voire de contourner, les principes fondamentaux du droit international de la mer et les restrictions d’intervention liées aux frontières maritimes. La recherche d’un nouvel équilibre pragmatique entre le respect du droit international « classique » et les exigences imposées par la croissance de la criminalité maritime semble aujourd’hui politiquement indispensable.

À l’instar du trafic de drogue, l’étude de la CMB révèle qu’aucune disposition particulière ne traite du trafic maritime de migrants. Les Nations unies ont, par conséquent, entrepris de combler ce vide juridique en adoptant le 15 décembre 2000, le Protocole de Palerme contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer. Très fortement inspiré de l’article 17 de la convention de Vienne de 1988, ce texte procède à une extension des pouvoirs d’intervention en haute mer par le biais d’un mécanisme de notification et autorisation entre État côtier et État du pavillon. L’analyse permet cependant de souligner la difficulté juridique de lutter contre ce trafic qui touche des êtres humains ne se trouvant en situation irrégulière qu’à partir du moment où ils franchissent les frontières maritimes d’un État. En haute mer, avant d’entrer dans un espace maritime relevant de la souveraineté d’un autre État, le migrant demeure en effet soumis à la juridiction de l’État dont il est ressortissant.


L’étude du protocole conduit ainsi à un certain nombre d’interrogations concernant l’efficacité des mesures appropriées mentionnées. En effet, si l'embarcation est déroutée vers le pays initialement visé, l’expédition atteint bien son objectif de départ. De même, comment lutter légalement et surtout humainement, contre des trafiquants n’hésitant pas à mettre volontairement et cyniquement leurs passagers clandestins en situation de détresse afin de contraindre les autorités côtières à les recueillir ? La lutte contre ce type de trafic doit donc être menée le plus en amont possible du trafic, au niveau du contrôle des ports et des côtes de départ afin de décourager l’immigration clandestine. Ces opérations préventives se heurtent cependant, à leur tour, au principe de la souveraineté territoriale de l’État riverain. Force est par conséquent de constater, qu’une fois encore, le protocole, recherchant un certain équilibre entre principe de liberté des mers, souveraineté territoriale, devoir d’assistance aux personnes en mer et nécessité de répression de la criminalité maritime, n'est que relativement efficace. Le trafiquant de drogue ou de migrants n’est pas qualifié d’hosti humani generis et ne peut donc faire l’objet de la juridiction universelle réservée aux pirates des mers.
L’actualité maritime a récemment remis la piraterie au coeur de l'actualité. Celle-ci constitue le crime maritime international par excellence et une compétence universelle a expressément été prévue par la CMB pour le réprimer. Selon l’article 105, tout État, à travers ses bâtiments de guerre, peut ainsi visiter et arraisonner un navire suspect, puis procéder au jugement des pirates arrêtés. Ne sont cependant visés que les actes de piraterie se déroulant en haute mer. La définition actuelle de la notion de piraterie ouvrant juridiction universelle, ne couvre donc pas les actes commis dans les eaux territoriales (article 101). Pour ces actes dits de brigandage maritime, seule la juridiction de l’État côtier peut s'appliquer. Ce partage de juridiction devient toutefois particulièrement discutable lorsque l’État côtier n’est pas en mesure d’assurer cette répression. La piraterie contemporaine, notamment celle que connaît la Somalie, soulève en effet la question précise de l’opportunité de conserver ce découpage géographique de juridictions prévu par la CMB (A. Bellayer-Roille, « La Montée en puissance de la lutte contre la piraterie  maritime – Sus à l’hostis humani generis !», Annuaire de droit maritime et océanique, Tome XXVII, 2009,
pp.309-642). Si l'instauration d'un zonage maritime équilibré était l'objectif premier de la convention, la donne maritime internationale a évolué et la criminalité maritime a connu un essor considérable, rendant indispensable une nouvelle approche des prérogatives des États en mer et à une évolution du droit de police en mer.

Le principe de la compétence exclusive de l’État côtier sur sa mer territoriale a donc incontestablement connu une certaine érosion qui doit être comblée. Le droit de Hot Pursuit pourrait ainsi être revisité afin de continuer à s'appliquer lorsque le navire suspect franchit les limites extérieures de la mer territoriale d’un État autre que celui du bâtiment poursuivant. La poursuite pourrait se prolonger jusqu’à ce que les autorités de l’État côtier concerné prennent le relais. Cette innovation éviterait que les navires suspects puissent jouer comme ils le font fréquemment des « sauts de juridictions » entre mers territoriales voisines. Le défaut de prise de relais par l’État côtier autoriserait la poursuite automatique de l’intervention et les États, qui ne sont pas en mesure d’exercer leurs prérogatives régaliennes de police maritime, pourraient consentir à les déléguer, de facto, à d’autres États, ayant la volonté et les capacités de s’y substituer. Cette souplesse introduite dans l’application du droit de Hot Pursuit permettrait des incursions dans les eaux fragilisées et éviterait que celles-ci deviennent des zones de non-droit.

Les résolutions du Conseil de sécurité relatives au cas somalien ont autorisé le recours à la technique des Shiprider Agreements et la possibilité, pour les navires d’États tiers, de pénétrer dans les eaux territoriales somaliennes pour patrouiller (Entry to Investigate) et, le cas échéant, arrêter des pirates (cf. Opération Atalante de l’EU NAVFOR et OTAN TF 151). Ces résolutions ne valent cependant que dans le strict cas somalien et ne sont applicables qu’en raison du consentement exprès de la Somalie. Elles ne sauraient en aucun cas refléter la naissance d’une coutume internationale. Les réflexions politiques devront pourtant se pencher sur les potentialités ouvertes par ce précédent juridique, notamment lorsque la communauté maritime internationale est confrontée à la faillite d’un État côtier. Les États n’étant plus en mesure de garantir la sûreté dans leurs eaux territoriales ne devraient-ils pas renoncer à cette compétence qui leur échappe ? Pour quelles raisons, en cas de défaillance chronique d’un État côtier, ne pas autoriser de manière quasi-permanente les États disposant de moyens suffisants à patrouiller et à intervenir dans les eaux sensibles, dans l’intérêt général de la communauté internationale ? La nécessité politique de faire évoluer le droit international de la mer, dans le souci de répondre aux perturbations croissantes de l’ordre public maritime, apparaît aujourd’hui inéluctable. Outre le dépassement juridique et politique de la frontière maritime permettant d’intervenir dans des espaces maritimes nationaux, la sûreté maritime impose d’assurer la protection des espaces maritimes situés en-deçà de la frontière maritime et d’empêcher les incursions illégales dans les eaux territoriales.

La surveillance du franchissement des frontières maritimes

Face aux arrivées massives de migrants notamment sur les côtes du Sud de l’Europe depuis le début des années 2000, l’Union européenne a, par exemple, entrepris de favoriser les initiatives de collaboration entre États membres en vue du contrôle et de la surveillance des côtes méditerranéennes. L’intervention majeure de l’Union européenne, en la matière, a ainsi consisté en la création de l’agence européenne Frontex, dédiée à la coordination des opérations entre États membres en matière de contrôle des personnes aux frontières extérieures de l’Union européenne, et notamment aux frontières maritimes. Frontex contribue à la formation des corps de gardes-frontières nationaux et apporte, le cas échéant, une assistance technique aux États membres. L’agence doit faciliter les propositions d’opérations conjointes et de projets pilotes émanant des États membres ; elle peut également prendre l’initiative de telles opérations. Elle gère un inventaire des équipements techniques nationaux de contrôle et de surveillance. De nombreuses opérations maritimes multinationales ont ainsi pu être entreprises dans ce cadre. Il s’agit principalement de patrouilles de surveillance conjointes et d’opérations de police maritime, menées par différentes gardes-côtières nationales (HERA, Nautilus, Poseidon, INDALO, Minerva…). L’Union européenne a également contribué à l’instauration d’un réseau permanent de patrouilles côtières à ses frontières méridionales (European Border Patrols Network, EPN). Il s’agit ici d’une approche régionale fondée sur la coopération entre États méditerranéens limitrophes auxquels sont associés certains pays africains.

Il convient parallèlement de souligner que les États membres de l’UE ont instauré un réseau d’accord bilatéraux ou régionaux avec leurs États voisins d’Afrique du Nord, dans le but de procéder à des patrouilles maritimes mixtes. Certaines missions Frontex ont ainsi permis le déploiement, dans les eaux territoriales d’un État tiers africain, de moyens européens coordonnés par l’agence Frontex. Le volet navigation et patrouille est alors assuré par les européens et les fonctions de police menées par les forces locales embarquées à bord des navires sous bannière Frontex (ex : Opérations HERA). (Miguel A. Acosta Sanchez, « Coopération et sécurité aux frontières extérieures européennes : le cas du détroit de Gibraltar », AFDI, 2008, p.197 à 223).

La création d’équipes d’experts nationaux et de groupes préconstitués d’intervention rapide s’est, par ailleurs, rapidement, révélée nécessaire pour assister les États en proie à des pressions migratoires exceptionnelles et ainsi renforcer l’action de l’agence Frontex. Un mécanisme de création d’équipes d’intervention rapide (Rapid Border Intervention Team - RABIT) a ainsi été instauré en juillet 2007 et offre, par l’intermédiaire de Frontex, des équipes d’experts de police aux frontières en soutien aux États membres particulièrement exposés. Cette réserve de gardes-frontières est mobilisable rapidement et dispose, sur le terrain, de compétences exécutives. Il en ressort que les agents d’intervention d’un État membre peuvent ainsi être mis à la disposition d’un autre État membre et préfigurent ainsi une « force de police maritime européenne ».

Ces récentes modalités d’intervention de Bruxelles focalisées sur la lutte contre l’immigration clandestine et la nécessité de rechercher des solutions globales de surveillance et de protections des frontières et des espaces maritimes de l’Union européenne conduisent à s’interroger sur la projection potentielle, au niveau européen, du concept de « sauvegarde maritime ». Celui-ci, impulsé par la France, pourrait effectivement se propager à travers l'Union européenne dans la mesure où il s’agit d’une « synthèse des missions de défense et de service public » (A. Reglat-Boireau,
« La Sauvegarde maritime, domaine privilégié de coopération pour l’Union européenne » in A. Cudennec et G. Guéguen-Hallouët (dir.), L’Union européenne et la mer, Paris, Pedone, 2007, pp.361-368). Ce concept se traduit concrètement par un dispositif de surveillance et d’intervention, dense sur les côtes, étendu ou ponctuel au large. Il permet de se protéger de nombreuses menaces et retient, de ce fait, une approche transversale et intégrée. Les dimensions civiles et militaires sont alors réunies. La recrudescence des dangers liés au trafic maritime pourrait ainsi conduire à une forme de coordination européenne des moyens nationaux de lutte et ainsi permettre l’affirmation d’une posture de « sauvegarde maritime européenne ».

Si l’idée de création d’un corps de gardes-côtes européen n’est pas réaliste, une approche intégrée de surveillance maritime à l’échelle du vieux continent, reposant principalement sur un réseau européen coordonnant les systèmes nationaux de navigation électronique, de surveillance par satellite et les futurs systèmes d’identification et de suivi des navires à distance (Long Range Identification and Tracking - LRIT) semble, dans un premier temps, s’imposer. Le LRIT complètera l’AIS (Automatic Identification System) et les États membres de l’Union pourront bénéficier d’informations de situation sur les navires dans une zone de 1 000 milles au large de leurs côtes.

Une communication recensant les « Objectifs stratégiques et recommandations concernant la politique de transport maritime de l’Union européenne jusqu’en 2018 », publiée en janvier 2009 - COM (2009) 8 final du 21 janvier 2009, p.11 - a pour sa part annoncé la création d’un Système de surveillance transfrontière et transectoriel intégré au sein de l’Union européenne. L’objectif de ce système est d’accroître l’interopérabilité des activités de surveillance, d’améliorer l’efficacité des opérations en mer et de faciliter la mise en œuvre de la législation et des politiques communautaires applicables. Cette option devrait toutefois également incorporer les travaux des différentes agences européennes à vocation maritime (Frontex, Agence européenne pour la sécurité maritime et Agence européenne de contrôle des pêches). À travers ce système de surveillance permettant de détecter rapidement les événements porteurs de danger, le premier volet du concept de sauvegarde maritime européenne serait développé. La protection et la surveillance réelles des approches maritimes européennes nécessitent néanmoins une démarche complémentaire, consistant à donner aux forces de l’ordre européennes les capacités opérationnelles et juridiques d’intervention. Au-delà des questions de défense navale européenne, la rénovation du droit international de la mer apparaît par conséquent là encore indispensable et constitue un défi juridique et politique à relever.

La notion de frontière maritime revêt donc plusieurs aspects : délimitation de zones maritimes permettant d’y exercer une souveraineté territoriale et/ou une juridiction économique mais aussi démarcation qui peut être franchie par des forces d’intervention ou des acteurs illégaux. En toute hypothèse, ces lignes fluides, invisibles et fragiles, objets de nombreuses revendications potentiellement conflictuelles, suscitent plus que jamais la convoitise et impliquent une vigilance accrue. Leur stabilité et leur sécurité constituent dès lors un enjeu de politique internationale majeur pour les années à venir.

Références

•    ACOSTA SANCHEZ M.A., « Coopération et sécurité aux frontières extérieures européennes : le cas du détroit de Gibraltar », Annuaire français de droit international, Vol. 54, 2008, pp.197-223.

•    BELLAYER-ROILLE A., « La Montée en puissance de la lutte contre la piraterie maritime – Sus à l’hostis humani generis !», Annuaire de droit maritime et océanique, Tome XXVII, 2009, pp.309-642.

•    BELLAYER-ROILLE A., « La Lutte contre le narcotrafic en mer Caraïbe : une coopération internationale à géométrie variable », Revue générale de droit international Public, n°2, juillet 2007, pp.353-388.

•    CAZALA J., « Retour sur les méthodes de délimitation juridictionnelle d’espaces maritimes mises en œuvre dans quelques affaires récentes », Annuaire français de droit international, Vol. 54, 2008, pp.411-427.

•    COUTEAU-BÉGARIE H., L’Océan globalisé – Géopolitique des mers au XXIe siècle, Paris, Economica, 2007.

•    DUJARDIN B., « Le Contentieux de délimitation des droits territoriaux en mer », La Revue maritime, n°484, 2009, pp.40- 47.

•    LABRECQUE G., Les Frontières maritimes internationales – Géopolitique de la délimitation en mer, Paris, L’Harmattan, 2004.

•    MARÉ C., « L’Arctique : eldorado polaire menacé cherche désespérément régime de protection juridique », Annuaire français de relations internationales, Vol. 10, 2009, pp. 740-741.

•    ORTOLLAND D. et PIRAT J.- P., Atlas géopolitique des espaces maritimes, Paris, Technip, 2010.

•    REGLAT-BOIREAU A., « La Sauvegarde maritime, domaine privilégié de coopération pour l’Union européenne » in A. CUDENNEC, G. GUEGUEN-HALLOUET (dir.), L’Union européenne et la mer, Paris, Pedone, 2007, pp.361-368.

•    VÉDRINE C., « Ressources en Arctique et revendications étatiques de souveraineté », Revue générale de droit international public, n°1, 2009, pp.147-158.