Les régimes internationaux de l’environnement

Par Jean-Frédéric MORIN
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Jean-Frédéric MORIN, "Les régimes internationaux de l’environnement", CERISCOPE Environnement, 2014, [en ligne], consulté le 27/04/2024, URL : http://ceriscope.sciences-po.fr/environnement/content/part3/les-regimes-internationaux-de-l-environnement


A quoi bon investir dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre si les autres pays n’adoptent pas des mesures équivalentes ? Quel est l’intérêt d’imposer des quotas de pêche si les pêcheurs voisins peuvent librement épuiser les bancs de poissons ? Pourquoi ne pas entreposer des déchets nucléaires en Antarctique si les autres pays le font sans scrupule ?

La politique internationale de l’environnement est fréquemment confrontée à ces problèmes d’action collective. La communauté internationale a collectivement intérêt à investir dans la protection de la biosphère pour assurer sa pérennité, mais individuellement, les uns et les autres ont intérêt à réduire au minimum leur contribution aux coûts qu’implique la protection de l’environnement. Il y a donc inadéquation entre intérêts collectifs et intérêts individuels. Pour y remédier, il est parfois nécessaire d’adopter des règles communes : ce sont les régimes internationaux.

Cet article décortique le concept de régime international. La première partie présente la théorie des régimes dans ses nuances et ses spécificités. La deuxième pose la question des conditions nécessaires à la création de régimes. La troisième étudie leur évolution et leurs interactions. La quatrième et dernière partie porte sur leur efficacité.

Les régimes internationaux

En 1982, le politologue Stephen Krasner a proposé une définition du concept de régime international qui est aujourd’hui encore la plus fréquemment utilisée. Il définit les régimes internationaux comme « des ensembles de principes, de normes, de règles et de procédures de prise de décision, implicites ou explicites, autour desquels convergent les attentes des acteurs dans un domaine donné des relations internationales » (Krasner 1982 : 185, nous traduisons).

Selon cette définition devenue canonique, les régimes internationaux sont composés de quatre éléments : des principes, des normes, des règles et des procédures. Les principes sont des croyances fondamentales et consensuelles. Dans le régime des changements climatiques, un principe essentiel est que les émissions de gaz d’origine anthropique perturbent gravement le climat. Les normes, quant à elles, sont des modèles de comportements attendus pour une identité donnée. Dans ce même régime, une norme commande ainsi aux pays dits « développés » de réduire davantage leurs émissions que ne le font les pays dits « en développement ». Les règles sont des prescriptions ou des proscriptions d’actions spécifiques. Une règle du protocole de Kyoto de 1997, par exemple, exige de l’Union européenne qu’elle réduise ses émissions de 8 % par rapport au niveau de 1990 à l’horizon 2012. Enfin, les procédures sont les pratiques permettant d’adopter et de mettre en œuvre les choix collectifs. Les procédures du régime des changements climatiques favorisent le consensus multilatéral plutôt que des initiatives fragmentées.

Ces quatre composantes sont relativement cohérentes les unes avec les autres, et constituent un régime international. Comme toutes les institutions, les régimes internationaux sont relativement stables et contraignent les actions. Selon les théoriciens institutionnalistes libéraux, cette stabilité et cette contrainte permettent à chacun d’anticiper les comportements futurs des différents acteurs. En réduisant ainsi l’incertitude et en favorisant la prévisibilité, les régimes créent un climat de confiance, abaissent les coûts de transaction, et favorisent in fine la coopération. Les régimes internationaux ne peuvent donc contraindre à la coopération, mais ils contribuent à créer les conditions favorables à son expression.

Aussi, à l’instar des autres institutions internationales, les régimes internationaux peuvent être conceptualisés comme des variables intermédiaires, situées entre les structures d’interaction et les comportements des acteurs (Krasner 1982). D’une part, ils sont le reflet des structures en place, comme la distribution de la puissance et les idées dominantes. D’autre part, ils affectent et conditionnent le comportement des acteurs. La théorie des régimes s’oppose ainsi à la fois à un structuralisme qui ne reconnaitrait aucune autonomie aux acteurs et à un individualisme qui nierait la puissance des structures.

Malgré ces points communs avec les autres institutions internationales, un régime international ne doit pas être confondu avec une organisation intergouvernementale ou un traité international. Les organisations et les traités sont aussi des institutions, mais plus réduites. Ce sont souvent des composantes des régimes internationaux, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Il n’y a pas d’organisation intergouvernementale vouée exclusivement à l’eau douce, mais il existe bien un ensemble de principes, de normes, de règles et de procédures qui fondent les attentes des acteurs en matière d’eau douce. On peut aussi imaginer un régime international dépourvu d’instrument de droit public international. En matière de forêt, par exemple, les initiatives intergouvernementales demeurent particulièrement modestes, mais un régime a été développé par des acteurs non étatiques.

Une particularité du concept de régimes internationaux, qui le distingue des concepts voisins de « gouvernance mondiale » et de « système international », est qu’un régime est forcément limité par les frontières d’un domaine donné des relations internationales. Un domaine est un ensemble d’enjeux qui sont abordés de front par un même groupe d’acteurs et qui sont considérés comme interdépendants. Une analyse en termes de régime implique qu’il est nécessaire de limiter les observations au domaine choisi. Il serait par exemple inapproprié d’expliquer les préférences ou le rapport de force d’un acteur dans les négociations en matière de traitement des pesticides par l’étendue de ses forêts, ses politiques énergétiques ou ses émissions de gaz qui appauvrissent la couche d’ozone. Le régime des pesticides est distinct de celui des forêts, de celui de l’énergie et de celui de l’ozone, et ces différents régimes doivent être analysés distinctement.

Par ailleurs, la notion de domaine invite le chercheur à tenir compte de constructions sociales. En effet, l’étendue d’un domaine dépend non seulement de ses caractéristiques objectives, mais également du prisme à travers lequel les acteurs le perçoivent. L’étendue d’un domaine, et dès lors les frontières d’un régime international évoluent avec l’idée que s’en font les acteurs. Par exemple, alors qu’on a longtemps perçu la diversité culturelle et la diversité biologique comme deux domaines indépendants, ils sont aujourd’hui étroitement associés. La diversité culturelle est devenue une question centrale du régime international de la diversité biologique.

A partir de cette définition générale, plusieurs types de régimes internationaux peuvent être distingués (Breitmeier et al. 2006). Certains misent sur un degré élevé de centralisation et de réglementation, comme le régime international des espèces menacées. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (1973) impose en effet des règles précises et des procédures complexes pour l’importation et l’exportation de plusieurs espèces. D’autres régimes internationaux sont plus flexibles et s’appuient sur des mécanismes de marché. C’est le cas du régime sur la diversité biologique qui laisse aux fournisseurs et aux utilisateurs de ressources génétiques le soin de négocier leurs transactions pour autant qu’elles répondent à certains principes généraux.

On peut aussi distinguer les régimes publics des régimes privés (Green 2013). Bien que plusieurs régimes internationaux de l’environnement soient établis par des Etats et visent à réguler leurs relations, un nombre croissant de régimes sont mis sur pied par des entreprises, des organisations non gouvernementales et d’autres acteurs privés. C’est le cas notamment du régime international sur la certification des produits de la pêche. Mais quels que soient leurs instigateurs et leurs mécanismes, certaines conditions favorisent l’émergence de régimes.

La création des régimes internationaux

Tous les problèmes environnementaux ne sont pas régulés par des régimes internationaux. Par exemple, le problème de la brume arctique causé par la pollution de l’air et celui du blanchiment des coraux ne font l’objet d’aucune coopération internationale institutionnalisée (Dimitrov 2006). Dans ce contexte, comment expliquer que certains problèmes fondent des régimes internationaux, et d’autres pas ?

La recherche dédiée aux régimes économiques s’est principalement concentrée sur la distribution asymétrique de la puissance pour expliquer la création et le maintien des régimes. Plusieurs chercheurs considèrent que la présence d’une hégémonie est une condition favorisant la création de régimes à caractère économique. Mais dans le domaine de l’environnement, la recherche a plutôt porté sur le savoir scientifique comme condition favorable à la création de régimes.

On pourrait croire, de prime abord, qu’il existe un lien direct entre la connaissance scientifique d’un problème environnemental et la création d’un régime pour le résoudre. Or ce n’est pas le cas. Plusieurs régimes internationaux ont été adoptés dans un contexte d’incertitude scientifique marquée. Le régime international régulant les essais nucléaires, par exemple, a été négocié dans les années 1960 alors que les effets d’une faible contamination radioactive étaient incertains. De même, le régime international sur la couche d’ozone a été constitué dans les années 1980, lorsque l’étendue de l’appauvrissement de la couche d’ozone était encore vivement débattue. Plus récemment, le régime sur les risques biotechnologiques a été établi avec le protocole de Cartagena sur la biosécurité en 2000, bien que les risques que représentent les organismes génétiquement modifiés étaient discutables.

Non seulement l’absence de certitude scientifique ne constitue pas toujours un frein à la coopération internationale, mais dans certains cas, la multiplication de données scientifiques peut même s’avérer un obstacle. En effet, l’incertitude peut favoriser la coopération en voilant l’ampleur des enjeux et en masquant les intérêts des uns et des autres. Par exemple, l’incertitude sur la quantité, la valeur et la localisation des minéraux dans l’Antarctique a favorisé l’adoption d’un moratoire sur les activités minières sur le continent. De même, l’incertitude sur la diffusion de la pollution en mer Méditerranée a encouragé les Etats riverains, surestimant cette diffusion, à coopérer pour réduire la pollution tellurique (Haas 1990).

En revanche, l’activisme politique d’un réseau de scientifiques peut contribuer à la création de régimes internationaux. Ces réseaux sont parfois appelés « communautés épistémiques » (Haas 1992). Bien que les scientifiques ne disposent pas eux-mêmes des leviers politiques et économiques nécessaires pour créer un régime, ils sont socialement reconnus comme des titulaires privilégiés de savoir. Cette capacité à produire des allégations faisant autorité est une source de pouvoir important qui leur permet d’orienter la définition des problèmes et des solutions appropriées. Cette position privilégiée leur permet aussi non seulement d’alimenter les gouvernements en information, mais aussi de participer à la construction du prisme à travers lequel les problèmes environnementaux sont compris. Par exemple, en présentant la réduction de la biodiversité comme une menace pour la recherche en biotechnologie, une communauté épistémique peut stratégiquement placer cette question environnementale sur l’agenda politique des gouvernements soucieux de la pérennité de l’industrie biotechnologique. C’est ainsi que des communautés épistémiques ont contribué activement à la mise sur pied de différents régimes, dont celui de la biodiversité, mais aussi celui sur la pollution atmosphérique transfrontière et celui sur les changements climatiques.

Cependant, tous les types de savoir promus par les communautés épistémiques ne contribuent pas de la même manière à la création des régimes. Les connaissances scientifiques qui encouragent le plus les acteurs politiques à créer des régimes internationaux sont celles qui portent sur l’interdépendance entre les différents pays. Les connaissances sur la magnitude de la dégradation environnementale et ses conséquences socio-économiques semblent moins mobilisatrices (Dimitrov 2006).Ce n’est donc pas la science elle-même qui mène directement à la formation de régimes, mais les rapports d’interdépendance qu’elle met au jour. Lorsque les travaux scientifiques font valoir qu’aucun Etat ne peut s’attaquer à un problème international en faisant cavalier seul, les Etats sont incités à faire front commun, même si les niveaux de risque, la gravité des problèmes et l’efficacité des solutions envisagées s’avèrent incertains.

L’évolution des régimes

Les régimes internationaux demeurent relativement stables en raison de leurs profonds ancrages juridiques et idéologiques. Une fois mis en place, il devient difficile de les faire dévier de leur trajectoire (Young 2008). De nouvelles règles peuvent être adoptées, les procédures de prise de décision peuvent être amendées, mais les principes et les normes sur lesquels ils s’appuient restent inchangés. Les « révolutions de régimes » sont rares. Les régimes ont plutôt tendance à évoluer en étant « dépendants de leur sentier ». Certains sont figés, mais plusieurs se développent et prennent de l’expansion, tout en maintenant le cap fixé initialement.

L’évolution des régimes internationaux de l’environnement suit généralement un même schéma. Les Etats définissent d’abord un nouveau problème environnemental par le biais d’une déclaration politique qui n’a pas de valeur juridique contraignante, mais qui détermine les grands principes du régime en construction. Puis, sur la base de cette déclaration, ils concluent une convention-cadre qui fixe les principales normes. Un ou plusieurs protocoles, adoptés quelques années plus tard, viennent ensuite la compléter en définissant des règles plus précises. Parallèlement, la conférence des parties, c’est-à-dire l’assemblée des pays ayant ratifié la convention-cadre, élabore des procédures pour assurer son suivi et sa mise en œuvre. Par conséquent, même si une simple déclaration politique peut décevoir les observateurs qui espèrent des règles plus contraignantes, il faut bien reconnaître qu’il s’agit souvent d’un premier pas dont l’importance est considérable puisque les principes qu’il consacre orienteront les négociations ultérieures.

Le cas du régime juridique relatif à l’Antarctique illustre bien cette filiation institutionnelle. Ce régime fut établi à la fin des années 1950 dans le contexte de la guerre froide. Motivé davantage par des principes pacifistes qu’environnementaux, le Traité sur l’Antarctique (1959) énonce « qu’il est de l’intérêt de l’humanité tout entière que l’Antarctique soit à jamais réservée aux seules activités pacifiques et ne devienne ni le théâtre ni l’enjeu de différends internationaux ». Progressivement, de nouvelles règles sont venues se greffer à cette base, d’abord sur la protection des phoques, puis sur celle de la flore et de la faune marines. Un protocole spécialement dédié aux questions environnementales a été adopté en 1991. Aujourd’hui, l’Antarctique n’est plus seulement pensé comme une terre de paix, mais aussi comme une réserve naturelle commune où toutes les activités nuisibles à la faune et à la flore sont formellement interdites. Les diverses règles environnementales adoptées depuis les années 1970 découlent d’un principe établi dès 1959, celui de la poursuite de « l’intérêt de l’humanité tout entière ».

Cette stabilité des régimes internationaux soulève des problèmes particuliers. En effet, l’état de la dégradation environnementale, les connaissances sur cette dégradation, et le contexte politique international n’évoluent pas de manière linéaire. Cela peut dès lors générer un décalage entre des régimes relativement stables et un environnement en constante mutation (Young 2002). Parce que le régime international des changements climatiques a été fondé au début des années 1990 sur le principe de responsabilité commune mais différenciée entre les pays développés et en développement, permettant à des pays comme l’Inde et la Chine de se fixer des objectifs beaucoup plus réduits, il est aujourd’hui difficile de remettre ce principe en question même si, vingt-cinq ans plus tard, ces pays sont devenus de grands émetteurs de gaz à effet de serre et qu’ils ont acquis les moyens économiques et technologiques pour réduire leurs émissions. Si la stabilité est la principale force des régimes, parce qu’elle favorise la coopération, c’est aussi leur principale faiblesse.

La difficulté d’adaptation des régimes internationaux à leur environnement soulève également le problème des interactions entre les différents régimes (Morin et Orsini 2014). Parce que le nombre de régimes internationaux est en constante augmentation et que chacun évolue en prenant de l’expansion, certains finissent par se chevaucher. Il se crée alors des constellations de régimes, liés les uns aux autres, que l’on appelle « complexes de régimes ». Les différents régimes qui composent un complexe peuvent se faire concurrence, développer des synergies ou encore entrer en conflit. Par exemple, planter des arbres à croissance rapide peut contribuer à la captation des émissions de dioxyde de carbone, mais en même temps réduire l’efficacité de la Convention sur la diversité biologique. Puisque les régimes ont tendance à se développer en silo, il est parfois difficile de les réconcilier (Gehring et Oberthür 2006 ; Oberthür et Stokke 2011).

L’efficacité des régimes

Parce que le régime des changements climatiques est le plus connu de tous les régimes environnementaux et que plusieurs en tirent un bilan négatif, on peut être tenté d’adopter une attitude pessimiste et croire que les régimes internationaux sur la protection de l’environnement sont voués à l’échec. Ce verdict doit, à tout le moins, être nuancé. Par exemple, le régime international sur la couche d’ozone a permis de réduire substantiellement la production et la consommation de chlorofluocarbure (CFC). La couche d’ozone, qui contribue au maintien de la température du globe et à la protection contre les rayons ultraviolets, est maintenant en phase de reconstruction. Il n’y a donc pas lieu d’être cynique ou fataliste. Il faut plutôt réfléchir aux conditions qui permettent à un régime environnemental d’atteindre ses objectifs.

Pour éclairer le débat sur l’efficacité des régimes internationaux, il est utile de distinguer leur produit, leur résultat et leur impact. Le « produit » renvoie à l’adoption de programmes, de normes ou de règles par les autorités nationales pour mettre en œuvre des engagements internationaux. Le « résultat » est un changement de comportement des acteurs pour se conformer aux règles adoptées. Enfin, « l’impact » se mesure à la contribution effective d’une mesure politique à la résolution d’un problème environnemental. Ces trois concepts sont clairement reliés, mais il n’y a pas de lien direct et automatique entre les uns et les autres (Young 1999).

En raison des difficultés méthodologiques que soulève l’étude des impacts environnementaux, la majorité des analystes se concentrent sur les changements de politiques et de comportements, plus faciles à mesurer et à relier par un lien causal à un régime international que la situation d’un problème environnemental (Haas et al. 1993). Cette perspective se fonde sur le postulat que des régimes internationaux peuvent amener les acteurs à adopter des comportements plus durables et, ce faisant, contribuer à l’atteinte des objectifs environnementaux. Cependant, certains jugent cet accent sur les politiques et les comportements insuffisants puisque la conformité aux obligations souscrites peut simplement résulter de la modestie de ces obligations. Mais se concentrer sur la résolution d’un problème environnemental soulève d’autres difficultés. La Russie, par exemple, a effectivement réduit ses émissions de gaz à effet de serre comme l’y enjoignait le protocole de Kyoto, mais ce « succès » résulte moins des politiques environnementales russes que de l’effondrement de l’industrie consécutif à la dissolution de l’Union soviétique.

Malgré ce débat méthodologique, les analystes s’entendent pour reconnaître que les régimes internationaux n’ont pas tous le même degré d’efficacité. Plusieurs facteurs expliquent cette variation d’un régime à l’autre. L’un de ces facteurs est bien évidemment la concordance entre les intérêts et les valeurs des différents acteurs, qui détermine leur volonté de modifier leurs comportements. Cependant, il ne suffit pas que les acteurs ciblés acceptent de modifier leurs comportements ; encore faut-il qu’ils en aient la capacité. Dans ce contexte, le renforcement des capacités techniques, scientifiques, bureaucratiques et financières des pays en développement est devenu une préoccupation centrale de plusieurs régimes environnementaux (Miles et al. 2002).

Conclusion

Face à l’efficacité incertaine des régimes internationaux et à leur chevauchement croissant, certains proposent de créer une nouvelle organisation, forte et indépendante, qui centraliserait tous les régimes internationaux de l’environnement. Les défenseurs de cette idée considèrent qu’une telle organisation assurerait une plus grande cohérence normative, qu’elle aurait une autorité accrue pour faire pression sur les Etats, et que sa force institutionnelle permettrait de faire contrepoids à l’Organisation mondiale du commerce. Ses détracteurs sont plutôt d’avis que sa lourdeur bureaucratique risquerait de ralentir les efforts de coopération, qu’elle serait vulnérable aux stratégies de puissance des acteurs les plus récalcitrants, et qu’une gouvernance décentralisée reposant sur de multiples régimes autonomes offre davantage de flexibilité et d’adaptabilité. Ce débat fait toujours rage, tant dans les milieux universitaires que politiques (Biermann et Bauer 2005).

Références

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