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SommaireIntroductionLe XXIe siècle appelle à revisiter la puissance - Marie-Françoise Durand et Christian Lequesne La persistance de la puissance militaireDe la puissance militaire : Aron revisité - Frédéric Ramel
Résumé
La puissance incarne une notion classique qui a offert le socle à partir duquel les canons des relations internationales ont été élaborés. Or elle fait l’objet d’un profond renouvellement. Du point de vue académique, l’idée selon laquelle la puissance est une relation dialectique entre deux volontés a laissé place à d’autres conceptualisations qui privilégient d’autres ressources (soft power) ou d’autres espaces d’expression ayant moins la contrainte de l’autre pour finalité que l’imposition de règles du jeu (puissance structurelle). Du point de vue pratique, l’usage de la puissance militaire durant la première décennie du XXIe siècle a rencontré des obstacles considérables pour ne pas dire essuyé des revers majeurs : le recours à la force armée ne parvient pas à une bataille décisive traduisible en victoire politique en Irak ou en Afghanistan, ce qui donne corps à une « impuissance de la puissance ». Ces deux tendances ne rendent-elles pas nécessaires une révision des approches défendues par Raymond Aron dans Paix et guerre entre les nations, ouvrage qui a fêté ses cinquante ans en 2012 ? En effet, cette œuvre offre les fondements de l’analyse des relations internationales qu’Aron a développée en accordant une primauté aux figures du soldat et du diplomate, c’est-à-dire à ceux qui agissent au nom de la puissance étatique sur un théâtre stratégique et dans une arène diplomatique. Dans les deux cas, l’ombre de la guerre plane même si Aron, contrairement à Morgenthau, n’en a pas fait la seule et unique activité du politique. Cette contribution accordera une place prépondérante aux interprétations de Clausewitz car la conceptualisation de la puissance que livre Aron emprunte largement à ce dernier. Cette réflexion sur la puissance chez Aron sera également l’occasion de critiquer le qualificatif de « réaliste » appliqué à la pensée aronienne. Elle mettra en aussi en évidence les apports et les limites d’une approche des enjeux stratégiques contemporains à partir d’Aron
Empires et puissance - Romain Bertrand
« Avoir la bombe ». Repenser la puissance dans un contexte de vulnérabilité nucléaire globale - Benoit Pelopidas
Résumé
L’arme nucléaire est communément désignée comme l’arme absolue, supposée octroyer la puissance à qui la possède. Cet article examine ces affirmations à la lumière de l’histoire nucléaire internationale. En rappelant les évolutions majeures de la technologie nucléaire militaire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il révèle la diversité des systèmes d’armes regroupés sous l’appellation de ce que l’on appelle « la bombe » et met à jour une condition de vulnérabilité nucléaire globale, apparue au début des années 1960 qui impose de repenser la puissance par « la bombe ». Le texte critique ensuite les composantes de la puissance communément associées à la détention de systèmes d’armes nucléaires : un statut de grande puissance ; une puissance coercitive et enfin une puissance dissuasive. Il conclut en redéfinissant la notion de puissance à la lumière du contexte de vulnérabilité nucléaire globale.
Puissance et impuissance des interventions extérieures - Pierre Hassner
Résumé
L’article commence par rappeler les discussions qui ont divisé les spécialistes américains de science politique et de stratégie sur la notion de puissance appliquée au monde bipolaire et à la guerre du Vietnam. Ces discussions ont dégagé l’opposition d’une conception quantitative et utilitariste de la puissance et d’une conception reconnaissant le rôle des passions et celui des différences culturelles. Le texte se poursuit par l’évocation de l’alternance, dans la stratégie des interventions américaines, des slogans Search and destroy et Winning hearts and minds, baptisés depuis « stratégie anti-terroriste » (et « stratégie insurrectionnelle »). Adoptant une formule du général Desportes (« Le piège américain ») sur la stratégie américaine fondée sur la technique et l’usage massif de la force, l’article désigne les phases suivantes sous le nom de « piège français » (découverte et imitation de la doctrine des colonels français pendant la guerre d’Algérie dans des conditions encore moins favorables qu’en Afghanistan) et de « piège israélien » (transformation de la guerre en attentats ciblés grâce aux drones). Il se conclut sur le dilemme du départ – prématuré ou trop tardif – des forces expéditionnaires, au risque de laisser une situation anarchique et potentiellement génocidaire ou de devenir impopulaires dans le pays intervenant et dans celui qu’elles veulent transformer.
Résumé
La discussion des rapports entre marché et politique est le plus souvent posée dans des termes caricaturaux: à la fin, l'un est censé l'emporter sur l'autre. A moins, par exemple, qu'on interprète les problèmes de gouvernance économique globale en termes de « guerre économique » : une métaphore particulièrement stérile, qui opacifie les problèmes au lieu de les éclairer. La présente contribution cherche à reproblématiser la question en insistant notamment sur deux points : d'une part les différences riches et significatives existant entre la première mondialisation (1870-1914) et la phase actuelle (post-1990) ; de l'autre l'idée qu'aujourd'hui, l'engagement des souverains sur la scène internationale est contingente, ou optionnelle, alors qu'au plan local, leur obligation de défendre de la société et la division du travail est imparable. Les souverains agissent plus que jamais localement et sont sanctionnés par leurs citoyens et leur société civile.
Variations sur le soft powerRésumé
Le soft power (« pouvoir souple ») est un concept à la fois descriptif et prescriptif d’actions excluant des nombreux moyens d’incitation et de dissuasion dont dispose une unité politique pour promouvoir ses buts. Toute action militaire ou para-militaire (ou menace d’y recourir), relève du hard power (« pouvoir dur »), sauf comme réponse à une agression directe imputable à une autre unité politique repérable. Sont examinés dans ce texte tout d’abord les trois « paradigmes » (réaliste, internationaliste-libéral, constructiviste) dans lesquels s’inscrit le concept de soft power. Aucun des trois ne peut prétendre en avoir le monopole non plus que son opposé. Le soft power est ensuite présenté comme moyen d’action allant jusqu’à l’attraction exercée par les valeurs d’un camp sur les populations de l’autre ; on le situera dans un continuum et non dans une opposition dichotomique au hard power, ce que traduit parfois l’idée de « smart power ». Le soft power est enfin appréhendé comme attribut d’une Puissance (soft Power) qualifiée de « Puissance civile » ou de « Puissance normative ». Dans chacune des acceptions, le soft P(p)ower est un concept incomplet qui ne saurait rendre compte de la réalité d’actions dont la mise en œuvre ne peut être que contextuelle et circonstancielle.
Résumé
Depuis quelques années, la Corée du Sud apparaît comme un pays doté d’un soft power significatif, présentant notamment une dimension culturelle particulièrement développée. Le succès mondial rencontré en 2012 par le chanteur Psy avec son clip vidéo Gangnam Style et la visibilité internationale acquise par certains artistes emblématiques de la K-pop (musique pop coréenne) y sont pour beaucoup mais n’en représentent qu’une facette qui ne permet pas à elle seule de saisir les différents éléments caractéristiques de ce soft power. Celui-ci s’appuie en premier lieu sur l’émergence de la Corée comme puissance économique, et plus spécialement comme puissance commerciale exportatrice, qui en fait un modèle pour de nombreuses économies émergentes. Il repose par ailleurs sur une politique active de développement des industries culturelles et de diffusion des produits culturels coréens à l’international. En d’autres termes, le soft power coréen repose sur une synergie particulièrement réussie entre puissance économique et industries culturelles.
Résumé
Les fondations politiques allemandes représentent un défi pour l’étude des relations de pouvoir dans l’espace international. Financées quasi entièrement par des fonds publics, elles disposent néanmoins d’une considérable autonomie d’action. Indissociables des partis politiques, elles entretiennent, pour le compte de ces derniers, un dialogue avec des responsables politiques, syndicaux, mais aussi avec des militants associatifs, journalistes et chercheurs dans plus d'une centaine de pays. Grâce à leur ancrage simultané dans ces deux champs d’action – le politique et celui de l’action publique extérieure –, les fondations parviennent à accumuler des ressources considérables, tant en termes financiers et symboliques. Professionnelles de l’assistance à la démocratisation, ces organisations peuvent se prévaloir d’une expérience internationale de plusieurs décennies.
La diplomatie culturelle française : une puissance douce ? - Daniel Haize
Résumé
« La France, puissance d'influence » était le thème de la XXIe Conférence des ambassadeurs (27-29 août 2013). Quel est l’impact de la diplomatie culturelle française ? Celle-ci est-elle vectrice d’influence, de puissance ? Analysé par le biais des indicateurs de performance ainsi que des informations émanant du terrain et des chercheurs, les résultats paraissent contrastés d’autant qu’en l’absence de priorité politique et avec des moyens en berne, les réformes pour améliorer la performance de la diplomatie culturelle, qui ne concernent guère le terrain où celle-ci se forge concrètement, entraînent seulement des changements à la marge.
Le hard du soft : la matérialité du réseau des réseaux - Dominique Boullier
Résumé
Le réseau des réseaux serait il devenu, comme le montrent les interceptions massives de la NSA, aisément contrôlable ? Plusieurs propriétés matérielles des tuyaux et des machines qui constituent l'infrastructure d'internet peuvent en effet donner une idée précise des frontières, des filtres et des contrôles possibles : les câbles, les points d'entrée dans les pays, les serveurs de noms de domaine ou des points d'échange internet. La géographie de ces supports techniques essentiels au réseau montre des déséquilibres et des fragilités, que l'on retrouve dans les grands calculateurs ou dans les standards des réseaux mobiles. Mais les arènes politiques manquent toujours pour décider de ces architectures pourtant si cruciales qui formatent notre monde commun, mais pourtant séparé et contrôlé.
La diversification des espaces de production du savoir - Michel Grossetti, Denis Eckert, Laurent Jégou, Marion Maisonobe, Yves Gingras et Vincent Larivière
Résumé
La plupart des politiques scientifiques actuelles intègrent une réflexion sur les villes et l’organisation géographique de l’activité scientifique. Dans la lignée des travaux sur les world cities, l’idée s’est imposée que les grandes agglomérations connectées entre elles parviennent à tirer un meilleur parti de la compétition internationale. On observerait donc dans ces villes une tendance à la concentration croissante des activités. Parmi les travaux utilisant des mesures fondées sur les publications scientifiques, certains soutiennent cette hypothèse, alors que d’autres montrent que pour certains pays, comme la Chine, on observe plutôt la tendance inverse, les plus grandes agglomérations voyant leur poids relatif régresser dans les activités scientifiques du pays. Cet article présente les résultats d’une recherche portant sur l’ensemble des activités scientifiques mondiales. Les contributeurs des articles recensés par le web of science ont été géocodés, puis regroupés en agglomérations. L’analyse de ces données est sans ambiguïté, c’est bien la tendance à la déconcentration qui s’impose à l’échelle mondiale comme à l’intérieur des pays, même si l’on observe quelques rares exceptions, pour lesquelles des explications sont avancées.
Al-Jazeera : les ressorts incertains de l’influence médiatique - Mohammed El Oifi
Résumé
La visibilité internationale dont bénéficie la chaîne d’information qatarie Al-Jazeera depuis son lancement en 1996 explique en partie l’importance du rôle diplomatique que l’on attribue à l’Etat du Qatar dans les affaires moyen-orientales. Si l’influence médiatique d’Al-Jazeera est bien réelle (le taux d’audience est élevé et la chaîne provoque des réactions passionnées ), la conversion de ce soft power en gains politiques reste bien aléatoire. Au-delà de l’interrogation sur les médias (sources de puissance ou outils de politique étrangère ?), le cas d’Al-Jazeera montre que l’effet d’un média est déterminé par les conditions de sa genèse mais également par la structure du champ médiatique dans lequel il évolue. Ainsi, l’antériorité du développement de la presse sur l’instauration de l’Etat-nation dans l’espace arabe et la formation dès la fin du XIXe siècle d’un champ médiatique panarabe transforment toute initiative médiatique transfrontière d’un Etat arabe en un enjeu politique régional majeur.
« L'Occident » en question, le cliché du déclinLes Etats-Unis, une puissance en crise d’adaptation - Alexandra de Hoop Scheffer
Résumé
Les Etats-Unis se trouvent devant le paradoxe suivant : fustigés par le passé pour leur hyperpuissance envahissante et unilatérale, ils sont aujourd’hui critiqués pour leur impuissance et leur extrême prudence, voire leur inaction, en particulier au Moyen-Orient. Comment le président Obama envisage-t-il de remodeler cette puissance américaine et de l'adapter aux contraintes et aux changements du monde contemporain ? Washington fait face à une crise d'adaptation fondamentale ; les guerres en Afghanistan et en Irak ont montré, au cours des dix dernières années, l'incapacité des Etats-Unis à se transformer et à se mettre au diapason des nouveaux « paramètres » des relations internationales. Elu pour mettre fin aux guerres, Barack Obama reconnaît les limites de la puissance militaire américaine, dans le sens où les Etats-Unis ont de moins en moins « la capacité d’imposer leur volonté aux autres » par la force, à l’heure où la puissance économique et l’innovation technologique sont devenues des critères de puissance aussi, voire plus, importants, que la puissance militaire.
L'Union européenne entre l'évitement et le rêve de la puissance - Christian Lequesne
L’ONU, entre puissance et multilatéralisme - Mélanie Albaret
Résumé
L’Organisation des Nations unies est marquée, dès sa création, par la puissance. Négociée principalement par les trois grands (Etats-Unis, URSS et Grande-Bretagne) à Dumbarton Oaks, elle institutionnalise un club de puissants (CSNU) au cœur d’une instance multilatérale. Néanmoins, cette empreinte de la puissance sur l’institution multilatérale n’épuise pas les pratiques onusiennes. Les vertus égalisatrices du multilatéralisme à l’œuvre à l’ONU transforment les relations de puissance, offrant ainsi des opportunités d’autonomisation aux autres acteurs. En renouvelant le jeu de puissance, l’ONU devient une enceinte privilégiée des stratégies multilatérales de puissance moyenne. L’Organisation des Nations unies et la puissance entretiennent donc des liens plurivoques : la première peut être un frein ou un multiplicateur de puissance, une ressource et une contrainte pour les puissances, un instrument et un objet de puissance. Les puissances peuvent être créatrices de multilatéralisme ou fossoyeuses des institutions multilatérales ; elles peuvent servir le multilatéralisme, s’en servir ou le desservir.
Multilatéralisme et puissance - Guillaume Devin
Emergents : de nouvelles puissances ?Un ou des modèles de puissance chez les émergents ? - Joan Deas et Yves Schemeil
Résumé
Trois émergents seulement répondent aux conditions requises pour devenir un jour des puissances globales (la Chine, l’Inde et le Brésil). Leurs stratégies manquent de clarté, elles ne convergent pas toujours, elles peuvent même se concurrencer. Observés dans quelques grandes négociations internationales, leurs représentants adoptent des attitudes convergentes sur la constitution de groupes coalisés, regroupant des pays en voie de développement face aux pays riches, tout en se rapprochant des grandes puissances établies chaque fois que leurs intérêts l’exigent. Ils agissent pour que leur pays soit mieux représenté dans les institutions internationales, sans remettre en cause leurs règles du jeu.
Un hard power aux caractéristiques chinoises ? - Emmanuel Puig
Résumé
Aujourd'hui, le hard power chinois repose sur la combinaison d'une ambition politique forte et d'un contexte économique très favorable. En l'espace de deux décennies, la Chine a profondément réformé son appareil de défense et modernisé ses forces armées. Dès son au pouvoir en 2012, Xi Jinping a affirmé vouloir poursuivre la modernisation technologique de l'armée afin que celle-ci puisse mener à bien ses « nouvelles missions historiques ». Pourtant, en dépit d'une modernisation effective, le hard power chinois souffre encore de quelques limitations structurelles qui limitent sa portée
L'impuissance paradoxale du soft power de la Chine post-Mao - Stéphanie Balme
Résumé
Le soft power est devenu consubstantiel à l’affirmation des Etats depuis la fin de la guerre froide, et singulièrement depuis l’émergence de nations non occidentales au sein de la globalisation économique. Compte tenu de l’opposition récurrente et souvent radicale des autorités chinoises à l’égard des concepts politiques occidentaux, une critique de la notion de soft power aurait dû s’imposer. Or Pékin s’en est emparé très vite et depuis le début du XXIe siècle, promeut activement sa « puissance douce » a travers un réseau sophistiqué de relais culturels. Comment expliquer que la diplomatie de la République populaire de Chine, habituellement très souveraine se soucie de son manque d’attractivité ? L’influence de la culture officielle chinoise reste très superficielle par rapport au soft power underground, voire parfois radicalement dissident, qui pose un regard critique sur la société chinoise. Les symboles du soft power chinois (notamment Confucius) à l’étranger sont des figures largement contestées dans le pays. L’idée de soft power étant consubstantielle à celle de liberté, la nature autoritaire du pouvoir chinois empêcherait-il ce dernier de se doter d’une véritable « puissance douce » ? Après des décennies d’auto-destruction culturelle, la question renvoie à la Chine l’image d’un pays perdu dans les fondements de sa propre identité. Autrement dit, le soft power est avant tout un enjeu pour la Chine, avant d’en être un pour le reste du monde.
L’Inde en quête de puissance - Christophe Jaffrelot
Résumé
L'Inde, à la faveur de la croissance économique qu'elle a connue au cours de la dernière décennie, a accumulé plusieurs des attributs de la puissance (notamment une certaine force de frappe militaire) qui se sont ajoutés à ses atouts traditionnels (notamment le rayonnement de sa culture et le soft power qu'elle retire de son statut démocratique). Mais cette puissance nouvelle est en quête de sens. Un paradoxe si l’on se rappelle que l'Inde de Nehru avait un message pour le monde au moment où elle n'avait pas les moyens d'agir sur lui ; si ces moyens existent davantage aujourd'hui, le pays est passé de la Moralpolitik à une Realpolitik sans contenu clair. A cette évolution s'ajoute la tension qui travaille sa politique étrangère entre un souverainisme hérité du tiers-mondisme que New Delhi réinvestit dans son partenariat avec les BRICS et un tropisme pro-américain que promeuvent sa diaspora et ses milieux d'affaires. Tiraillée entre plusieurs tentations, l'Inde se réfugie souvent dans l'abstention au sein des instances multilatérales.
Brésil : politique étrangère, puissance et quête d’autonomie - Carlos Milani
Résumé
L’article s’interroge sur la place du Brésil dans le monde et sur son éventuel statut de puissance mondiale. Il analyse les sources de la puissance brésilienne (territoire, ressources naturelles, marché économique, régime politique et démocratisation, soutien au multilatéralisme, renforcement de la coopération sud-sud, leadership régional, capacité diplomatique de négociation) et en développant deux axes d’analyse : la comparaison avec d’autres puissances mondiales et le débat conceptuel sur le sens de la puissance (par rapport aux concepts d’hégémonie et de leadership).
Russie : le syndrome de la puissance - Anne de Tinguy
Résumé
La question de la puissance est au cœur de la politique étrangère de la Russie. Etat successeur d’un empire séculaire et d’une URSS longtemps considérée comme la deuxième puissance mondiale dans un monde bipolaire, dotée du plus grand territoire du globe, la Fédération de Russie se positionne résolument comme l’un des grands centres de pouvoir. Elle est en effet un acteur de poids dans la vie internationale ; les événements de l’automne 2013 en Syrie en témoignent. Quelque vingt ans après l’effondrement de l’Union soviétique, elle n’a pourtant plus depuis longtemps l’influence qui était la sienne du temps de la guerre froide. A de nombreuses reprises, Moscou n’a pas été en mesure de se faire entendre et de peser comme il le souhaitait sur les processus internationaux. A ce décalage entre son ambition de puissance et les déceptions subies, réelles ou ressenties comme telles, les dirigeants ont tenté de répondre. Dès les années 1990, ils ont cherché à renouveler les sources de l’influence de leur pays dans le monde en le dotant d’une large gamme d’outils diversifiés allant du hard au soft power. A partir de la fin des années 2000, soucieux de ne plus se voir imposer des décisions et de reprendre la main, ils ont recentré la diplomatie russe autour de quelques grands objectifs. Avec des résultats qui ne sont pas tous à la hauteur de leurs attentes.
Déviances et résistancesQue veut dire être un Etat déviant ? - Soraya Sidani
Résumé
Le phénomène de déviance d’un Etat – compris comme son écart par rapport aux normes conventionnelles ou à celles plus implicites liées à la distribution du pouvoir sur la scène internationale – renvoie à deux réalités distinctes a l’échelle internationale : la déviance normative et un phénomène de contestation de l’ordre. Dans le premier cas, l’Etat déviant présente d’importants handicaps structurels qui l’empêchent d’avoir une véritable existence sur la scène internationale ou ambitionne de se positionner au-dessus du système. Dans le second cas, le comportement déviant repose sur la contestation l’ordre imposé par les puissances dominantes. Notre contribution s’attachera à ces deux aspects de la déviance à travers une analyse des facteurs d’intégration et de marginalisation des Etats dans une première partie puis par une étude des formes et de l’évolution de la contestation étatique dans une deuxième partie.
Paradis fiscaux : la souveraineté à l’épreuve de la mobilité - Mathilde Dupré et Jean Merckaert
Résumé
La centralité des paradis fiscaux sur la scène internationale, à en croire les statistiques, a de quoi surprendre ; leur puissance peut sembler contrefaite. Tirant leur influence de leur opacité et de leur capacité à détourner artificiellement les flux financiers ou commerciaux, ils minent la souveraineté des grands Etats. Pourraient-ils pour autant exister sans l'assentiment de ces derniers ? Leur rôle est à resituer à la lumière d'un facteur central de puissance dans une économie ouverte : le différentiel de mobilité. Territoires vulnérables, les paradis fiscaux font le jeu des acteurs les plus mobiles – au premier rang desquels les multinationales, les banques internationales et les grands cabinets d'audit et de conseil, qui façonnent leur législation à l'envi. Comment mettre fin à cette situation ? Cet article esquisse les pistes de réponses, pointant l'insuffisance des stratégies menées par les pays du G20 même si les choses évoluent.
L’improbable leadership du Qatar
Prochainement
Asie du Sud : les amateurs-experts de la violence collective - Laurent Gayer
Résumé
Plus meurtriers que toutes les guerres interétatiques du passé, les conflits intraétatiques de l’Asie du Sud ont renforcé la polarisation sociale, ethnique et religieuse de l’ensemble des pays de la région, tout en alimentant la « milicianisation » de ses sociétés. Dans ce contexte, les opportunités de carrières violentes se sont multipliées pour les jeunes aspirants à la mobilité sociale. Ces carrières miliciennes impliquent cependant un parcours souvent fastidieux de professionnalisation. De surcroît, les résultats ne sont pas toujours – et en fait rarement – à la hauteur des attentes. La guerre irrégulière (re)paie bien mal ses petites mains.
La violence non étatique (en Afrique)
Prochainement
Le surgissement des sociétésPuissance et relations transnationales ? - Bertrand Badie
Résumé
L’altermondialisme est une notion difficile à cerner. On peut y voir un mouvement de la société civile globale, un mouvement social mondial, le nouveau grand mouvement d’émancipation, le refuge des antilibéraux ou bien encore l’un des symptômes de la renaissance de la critique du capitalisme. Il est néanmoins possible de le définir comme une nébuleuse de mouvements de la société civile qui partagent une même opposition à la « mondialisation libérale » et aspirent à une autre globalisation, cherchant à articuler les actions qu’ils mènent à l’échelon local et national à des enjeux globaux en s’accordant sur le caractère central des forums sociaux. Ces mouvements ont donc pour caractéristique d’établir un même constat sur l’état du monde et de proposer des réformes dans quatre domaines spécifiques : la mise en place d’un nouvel ordre économique global, la sauvegarde des biens communs, l’instauration de nouvelles formes de régulation et de gouvernances globales et la défense d’un véritable développement durable. En définitive, même si l’altermondialisme ne changera vraisemblablement pas la face du monde, il joue néanmoins un rôle important de contre-pouvoir global face aux principales puissances économiques.
Vers une recomposition des pouvoirs : Internet et réseaux sociaux - Séverine Arsène
Résumé
Internet et les réseaux sociaux mettent en évidence les dimensions les plus insaisissables du pouvoir, celles qui sont peu institutionnalisées, fluides et éphémères. En facilitant les conditions d’expression et d’action collective, ils ont créé une ouverture sans précédent de l’espace public, donnant ainsi droit de cité à de nouvelles catégories de citoyens parmi les moins favorisés. L’expression de l’opinion publique a ainsi acquis une force politique inédite, ce qui a bouleversé l’équilibre des pouvoirs, dans les démocraties comme dans les pays autoritaires. Cette ouverture du champ politique n’est pourtant pas seulement un facteur de démocratisation. Elle a conduit à la formation d’un véritable champ de bataille où les parties prenantes sont très inégalement armées et dessinent de nouvelles lignes de répartition des pouvoirs à l’échelle mondiale.
La conscience environnementale, condition d’une puissance soutenable ? - François Gemenne
Résumé
Cette contribution ambitionne de montrer en quoi les crises environnementales représentent une menace pour la stabilité des Etats, et donc un élément de leur affaiblissement. L'article met ainsi en évidence la corrélation entre les dégradations – brutales ou graduelles – de l’environnement et les problèmes de sécurité intérieure, ainsi que les processus sous-jacents à cette corrélation. Dans une seconde partie, l'article examine, a contrario, en quoi le développement durable peut constituer la condition d’une puissance soutenable. Puissance diplomatique d’abord, avec le développement considérable des questions environnementales dans les relations internationales, notamment autour d’enjeux mondiaux comme le changement climatique. Puissance économique ensuite, à l’heure où beaucoup d’économistes érigent la croissance verte en modèle d’une nouvelle prospérité pour les pays industrialisés, et la considèrent comme une voie de développement porteuse pour les pays du Sud.
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Le Ceriscope est une publication scientifique du Centre de recherches internationales (CERI) réalisée en partenariat avec l'Atelier de cartographie de Sciences Po L'enjeu mondialReligion et politique La collection Ceriscopes s’est achevée. Retrouvez-nous sur le site de L’Enjeu mondial, la nouvelle publication annuelle du CERI. Mots-clés du CERISCOPE PuissanceCERISCOPESceriscope
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